lundi 30 janvier 2012

La dame du béton du jour

C'est Pauline Marois, cheffe du Parti Québécois.

Le conseil national du Parti Québécois qui s'est déroulé cette fin de semaine à Montréal avait très clairement un double mot d'ordre : unité et mobilisation. Et, il faut bien le dire, le pari est gagné.

Pour ceux qui n'ont pas suivi : il y a encore quelques jours, personne n'aurait parié un sou sur Pauline Marois. Les médias l'annonçaient finie, à grands renforts de témoignages de "dissidents" ou de "déçus" du PQ. On pouvait même lire ici et là que son entêtement était simplement suicidaire pour la cause souverainiste et que le parti était condamné à disparaître lors des prochaines élections.

Même pour ceux, plus mesurés, qui n'aiment pas hurler avec les loups, il faut bien avouer qu'à moins d'avoir une foi indéfectible, voire aveugle, envers la cheffe, il y avait quand même de quoi douter un peu. Depuis la démission de Louise Beaudoin, Pierre Curzi et Lisette Lapointe du caucus péquiste, les prises de distance feutrées succédaient aux trahisons fracassantes. Mais non, faisant fi de la pression médiatique, des sondages en chute libre, des tendances à l'affolement y compris parmi ses proches, la cheffe est restée la cheffe.

Et il s'est produit au cours de la semaine dernière l'un de ces revirements qui font la joie de l'observateur de la vie politique. L'entêtée irresponsable est devenue la dame de béton. Les analystes ont commencé à s'interroger, discrètement mais sérieusement, sur ce qui faisait tenir Pauline Marois. Puis ils ont mesuré qu'au delà de quelques velléités individuelles de briller le temps d'une petite phrase, le PQ est toujours un grand parti, le plus grand et de très loin si l'on considère le nombre de militants, en ordre de marche derrière sa cheffe. Et ils ont enfin eu leur réponse lors du conseil national en écoutant son discours.

 

Pauline Marois se tient debout car, derrière, il y a une ambition. Pas simplement l'ambition de garder le pouvoir ou de le prendre (allusion à ce qu'elle appelle le "tandem Charest-Legault), mais l'ambition d'un Québec prospère qui se tient debout. Et soudain elle incarne un Québec mobilisé et fier, malgré les mauvais coups et les trahisons.

Comment ne pas rapprocher cette phase politique avec celle que vit François Hollande en France ? Accusé de mollesse, sans programme, à la tête d'une équipe disparate et démobilisée il est devenu, en quelques heures, le temps d'un discours, le seul capable de redonner à tout un peuple foi en le "rêve français".

Bon, la comparaison n'est pas parfaite car Pauline Marois a encore beaucoup à faire pour atteindre une popularité telle que celle de François Hollande. Et je ne veux surtout pas présager des résultats électoraux de l'une ou de l'autre. Mais je n'en démords pas : on ne prend pas le pouvoir uniquement parce qu'on est le plus sérieux ou le plus raisonnable ou qu'on a les meilleures idées. On gagne la confiance d'un peuple parce qu'on est capable d'incarner son ambition collective et ses valeurs fondamentales. Surtout en période de crise.

samedi 14 janvier 2012

Le paradoxe du jour

C'est Eva Joly, candidate du meilleur et du pire.

Le meilleur ? Ce clip sur les accents de la langue française :


C'est joyeux, c'est universel. On l'aime cette France là, qui parle en français pour se comprendre, mais un français de partout, riche des cultures pluricentenaires et des langues ancrées dans les régions françaises, riche des apports des francophones du monde entier et riche des trouvailles de tous ceux qui ont fait le choix à un moment de leur vie de parler cette langue.

Albert Camus disait que sa patrie, c'était la langue française. Mais l`écrivain ayant grandi en Algérie ne parlait certainement pas du français uniformisé, insipide et soi-disant "sans accent", parlé essentiellement à la télévision et qui est, en fait, l'accent de la télévision. Il voyait dans le français cette grande langue internationale qui unit les peuples par delà les cultures et les frontières et dont les "français de France" oublient souvent d'être fiers.

Mais, chez Eva Joly, il y a aussi le pire.

Le pire ? C'est cette proposition de faire de Kippour et de l'Aïd el-Kebir des jours fériés. Alors là, on n'est plus du tout dans la tradition universaliste de la République. Eva Joly souhaite par cette mesure faire avancer la laïcité mais, la laïcité, ce n'est pas un compromis entre les religions. Un compromis qui d'une part, comme tout compromis, créerait des insatisfactions (car quid des autres religions ?) et donc renforcerait les revendications communautaristes au lieu des les apaiser. Et un compromis qui d'autre part, laisse de coté le plus grand nombre des français qui, eux, ne croient pas ou ne pratiquent aucune religion. Les laisse de coté ou, pire, les somme de choisir un camp s'ils veulent exister.

La laïcité, c'est au contraire une organisation de la société telle que chacun est libre de croire ou de ne pas croire, de pratiquer une religion ou de n'en pratiquer aucune. Alors oui, la situation actuelle est certainement insatisfaisante mais il y a bien d'autres choses à faire comme tout simplement abolir les jours fériés d'origine catholique et donner autant de jours de congés supplémentaires aux travailleurs qui en disposeront selon leur bon vouloir. Et ce n'est qu'un exemple.

Entendons nous bien, quand je parle ici du meilleur et du pire, je ne juge pas sur une échelle absolue qui permettrait de savoir ce qui est bon ou non. Je parle des français. Des critères qui font que les français reconnaissent en un candidat quelqu'un qui est apte à incarner la République. Eva Joly, dans cette campagne, porte à la fois cette vision de la République tant mise à mal par Nicolas Sarkozy, une République juste, ouverte, irréprochable (je n'ai pas abordé ses propositions sur la lutte contre la corruption, par exemple, et bien d'autres encore) et une vision que les français, dans leur majorité, ont toujours rejetée. C'est bien dommage, car c'est une des raisons qui fait que les Verts font un score lors de la présidentielle bien inférieur qu'aux autres élections. 

mercredi 11 janvier 2012

Les conséquences du jour

Ce sont les «conséquences économiques et sociales comparables à celles provoquées par une guerre» qui nous sont promises par Bernard Accoyer, le Président de l’Assemblée nationale, en cas de victoire de la gauche en 2012. Ni plus, ni moins.
Alors que la campagne s’accélère, les propos de la droite deviennent de plus en plus violents et, à gauche, la riposte ne se pas fait attendre. Elle est de deux ordres. D’abord, les instances du Parti socialiste ont évidemment répondu en demandant des excuses pour ces propos exagérés. On peut lire à ce sujet le blog de Jean-Marc Ayrault, Président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale.
Deuxième type de riposte, plus légère mais redoutablement efficace, sur les réseaux sociaux et en particulier twitter où les sympathisants socialistes ont placé le mot-clef #silagauchepasse en tête des tendances du jour. Le but du jeu est simple et bien rodé : montrer le ridicule des propos de Bernard Accoyer en imaginant toutes les conséquences désastreuses que la France connaîtrait si la gauche passe en mai prochain. De cataclysmes météorologiques en promesses de représailles sanglantes, en passant par le remplacement de l’hymne national par une chanson de Justin Bieber, tout y passe et (presque) tout est drôle. L’occasion aussi de rappeler que déjà en 1981, la droite promettait que les chars soviétiques défileraient sur les Champs Elysées. François Mitterrand avait pourtant gagné.

C’est peut-être ce qui fait le plus plaisir aux soutiens de la gauche française dans ces propos. Ils estiment que si la droite en arrive à ces extrémités oratoires, c’est que ses responsables ne se font guère d’illusions sur les chances de réélection de Nicolas Sarkozy, qui n’a d’ailleurs toujours pas annoncé sa candidature.