lundi 30 mai 2011

Le soleil du jour

C’est celui de la Puerta del Sol, à Madrid.

photo : Julie Saint-André

Des dizaines de milliers de jeunes, et moins jeunes, réunis sous un soleil de plomb et à la clarté de la lune, vingt-quatre heures par jour, pour protester. Ils ne se revendiquent d’aucune organisation syndicale ou politique. Le premier geste a certes été posé par quelques centaines de militants du collectif ¡Democracia Real Ya !, mais ils ont très rapidement été largement débordés par la multitude qui a spontanément rejoint le mouvement. Alors, sans débouché politique clair, et vu le résultat des élections en Espagne, on pourrait conclure à l’inanité, voire la contre-productivité, du mouvement. Pourtant il continue et se répand un peu partout en Europe.

Sans tirer de conclusion hâtive ni se donner des airs de tout savoir, on peut quand même avancer que ce mouvement est avant tout porté par une revendication que le peuple juge juste et peut facilement faire sienne. C’est ce qu’ils appellent la démocratie réelle, en opposition au système actuel où quels que soient les représentants élus, la politique appliquée est celle dictée par les "experts" des organisations internationales et les agences de notation. Face à cette confiscation de la souveraineté populaire, ils décident donc de se retirer de ce jeu de dupes. La droite et la gauche appliquent de toutes façons la même politique économique ? On refuse donc de choisir entre eux. Le système électoral favorise les grands partis et biaise la représentation proportionnelle ? On ne vote donc plus.

Mais dans le même temps on construit le monde dans lequel on aimerait vivre. On fait la preuve par l’exemple que des dizaines de milliers d’inconnus peuvent vivre les uns avec les autres en s’entre-aidant, en se répartissant les tâches, en faisant jouer le respect et la solidarité entre tous. A la Puerta del Sol, grâce à cette organisation et cette solidarité, personne n’a soif malgré la chaleur et la foule, personne n’a faim même s’il ne possède rien. Ceux qui en ont besoin reçoivent les soins de première urgence. L’accès au savoir, à la culture, à l’information est assuré. Même les enfants ont leur espace protégé et animé par des volontaires compétents. Et tout le temps on peut s’exprimer, débattre et prendre part aux décisions collectives.

Chaque jour, la réponse, ou la non-réponse, des organisations politiques donne un peu plus raison au mouvement de rejet global de la classe politique. En Espagne, en Grèce, en Italie, en France, comme partout ailleurs, le personnel politique n’a finalement qu’une seule ambition : garder le pouvoir. Pourquoi ? Rien. Garder le pouvoir semble une fin en soi. Et il ne s’agit pas ici que des gouvernements en place, tant il est vrai qu’à l’échelle des communes, départements, régions, circonscriptions législatives, etc. le comportement des élus de tous bords est décidemment le même. Garder le pouvoir.

Voyons en France. Le gouvernement, de scandale en scandale, veut "garder le cap" pour mener à terme les "choix courageux qui s’imposent". Qui s’imposent à qui ? En tous cas pas à ceux qui les mettent en œuvre, ni à leurs amis. Et, plus intéressant encore, imposés par qui ? Le peuple souverain ? Ah, non, c’est vrai, ils s’imposent d’eux-mêmes.

Mais tout ira bientôt pour le mieux puisque les socialistes sont en ordre de marche. En ordre de marche pour redonner la parole au peuple ? Surement un peu puisqu’il y a les primaires citoyennes. Mais pas trop non plus. Car derrière le choix du candidat national se cachent les petits arrangements entre élus locaux multi-mandats et députés multirécidivistes pour la répartition bien ordonnée des sièges au Parlement. Malgré la volonté maintes fois réaffirmée par les militants de mettre fin au cumul des mandats et de mieux représenter la population, l’urgent dans les fédérations socialistes semble de s’assurer que tel député, en outre maire et autres choses bien rémunérées, ayant vu sa circonscription redécoupée en sa défaveur, ait un point de chute bien confortable pour continuer sa "carrière" ; de s’assurer que tel maire bien en vue puisse "naturellement" se présenter sur "sa" circonscription, sans que l’on ne voit trop que cela se fait au détriment de la parité et d’une meilleure représentativité. Et là, point de primaires, quelques militants auront seuls le droit de participer au plébiscite.
Alors on peut sérieusement se demander à quel point ce personnel politique là aura la volonté de réformer le système pour une démocratie réelle tant il s’est adapté à la routine de l’entre-soi.

La chanson disait "ne croyons plus aux lendemains qui chantent, c’est aujourd’hui que l’avenir s’invente, changeons la vie ici et maintenant" et disait juste. La démocratie n’est peut être pas très réelle mais le soleil, lui, brille pour de bon. Alors, pourquoi pas ? Sortir et construire ensemble sur les places une société qui nous ressemble.

vendredi 27 mai 2011

La lettre du jour

C'est celle adressée par David Rey à la députée Brigitte Barèges.

Le blogue du jour continue son ouverture avec cette lettre qui a l’énorme mérite, à mes yeux, de rappeler les bases les plus élémentaires de la notion de responsabilité politique.

Au-delà de Brigitte Barèges, et au-delà de ce sujet, bien des élus gagneraient à revoir leur fondamentaux, et feraient du bien à la démocratie.

mardi 24 mai 2011

Le blogue du jour

Il devient (un peu) collaboratif puisque j'y accueille sur une page annexe le très joli reportage de Julie Saint-André sur la Puerta del Sol.

Avis aux lecteurs : vos contributions sont les bienvenues !

lundi 16 mai 2011

L'archaïque du jour

C'est "la gauche de la gauche".

Du moins, c'est ce qu'explique Gérard Collomb faisant la promotion de son dernier ouvrage dans Paris Match. Une fois encore, il aurait peut-être mieux fait de s'abstenir.

Celui qui se qualifie lui-même de "très strauss-khanien" était en 2006 un soutien incontournable de Ségolène Royal contre... DSK. Très strauss-khanien en effet. Et attendons de voir son évolution dans les prochaines semaines, étant donnée l'actualité.

Alors, Gérard Collomb serait-il une girouette politique de plus ? Pas simplement. Car il a bien une motivation continue, un objectif immuable : la conservation de sa baronnie locale. Si cela veut dire être le féal du chef le plus à la mode, qu'à cela ne tienne. Si cela implique de fouler aux pieds, et le plus médiatiquement possible, les orientations politiques adoptées par la majorité des membres de son parti, qu'à cela ne tienne. S'il faut pour cela perpétuer les combines de la politique à l'ancienne qui font les riches heures de l'abstention et du rejet de la classe politique en général, qu'à cela ne tienne. S'il faut pour cela faire survivre des caricatures vides de sens telles que celle de "la gauche de la gauche" pour escamoter les débats idéologiques qui animent la gauche, qu'à cela ne tienne.

Le proverbe veut que ce n'est pas au vieux singe qu'on apprend à faire la grimace. Dans le cas présent, reconnaissons que parlant d'archaïsme, Gérard Collomb maîtrise son sujet.

mardi 10 mai 2011

La victoire du jour

C’est celle de François Mitterrand, élu Président de la République le 10 mai 1981, il y a trente ans jour pour jour.

On a beaucoup vu circuler sur les réseaux sociaux son premier discours après l’annonce des résultats avec cette phrase : «Nous avons tant à faire ensemble».


Mais c’est l’intégralité de cette phrase et ce qui suit qui me touche le plus.
«Nous avons tant à faire ensemble et tant à dire aussi. Des centaines de millions d’hommes sur la Terre sauront ce soir que la France est prête à leur parler le langage qu’ils ont appris à aimer d’elle.»

Quelle actualité dans ces mots ! Qu’il serait bon d’entendre à nouveau ce discours dans une période où l’on ne sait dire qui l’emporte de la xénophobie crasse ou du populisme électoraliste, où même la gauche manque cruellement d’ambition sur la scène internationale, soit qu’elle a déjà trop à faire à réparer en France les dégâts du sarkozysme, soit que d’aucun ne veuille faire d’ombre au directeur du FMI.

Rappelons-nous des voyages de François Mitterrand, Premier secrétaire du Parti Socialiste, dans le Chili d’Allende et son soutien actif après le coup d’état, dans le Bangladesh en lutte pour son indépendance, ou encore en Egypte au lendemain de la guerre du Kippour.

C’est une responsabilité qui s’impose aux socialistes, internationalistes par définition, et ce serait aussi toute une victoire dans la période actuelle, de faire réentendre, dans notre pays mais aussi partout où l’on veut «vivre et vivre libre», ce langage que le monde a appris à aimer de la France.

mercredi 4 mai 2011

Le ratage du jour

C’est celui d’un homme à la peau visiblement plus foncée que la mienne qui courrait ce matin pour attraper le tram. Sans succès, le tram est parti sans lui.

Comme quoi le degré d’athlétisme ne se mesure certainement pas à la couleur de peau.

Mais, comme la dernière fois, je ne veux pas tirer sur l’ambulance. Le ratage est surtout celui de notre société à faire évoluer les mentalités.